Si les dépenses publicitaires ne
cessent d’augmenter, venant à faire de l’Internet un média de plus en plus
important pour les publicitaires, il en est aussi une tendance à ne pas négliger,
celle de son influence. Selon une étude de la revue E-Marketer de 2009, 8 personnes sur 10 donnent du crédit à l’avis d’un
tiers lu sur Internet, même si ce tiers leur est étranger, contre 2 sur 10
seulement pour les publicités télévisés. Ainsi, Internet est aussi devenu le
média où l’on partage informations et avis, entre particuliers, loin des
mécanismes publicitaires classiques. Il est donc devenu stratégique pour les
entreprises d’occuper ce terrain afin de créer et d’améliorer leur image de
marque. Pourtant, quelques signaux faibles viennent à montrer que les
prochaines évolutions du web 2.0 peuvent transformer ce monde idyllique du
« like » à tout prix en véritable piège pour les entreprises.
Les marques les plus audacieuses sauront-elles alors relever le défi ?
Les marques les plus audacieuses sauront-elles alors relever le défi ?
Alors qu’il est évident qu’Internet est devenu un lieu incontournable
du débat public, il a aussi complétement bouleversé les relations entre marques
et consommateurs. Notre société de l’information, où il est désormais difficile
de dissimuler quoi que ce soit, a instauré une frontière entre l’image que la
marque veut bien projeter et sa perception par le consommateur. La relation
commerciale durable n’est plus jamais acquise et chaque faux pas peut alors prendre
une ampleur considérable, conséquence de l’avènement des réseaux sociaux
notamment et du web 2.0 en général.
En effet, si les réseaux sociaux représentent un outil
puissant de communication et de marketing pour les marques, ils sont devenus, à
l'inverse, une arme potentiellement dévastatrice pour les entreprises, en évoluant vers un
formidable moyen pour les consommateurs de les scruter et de réagir au moindre
faux pas. Pour beaucoup d’internautes, l’inefficacité des services clients
traditionnels, entre autre, les a amenés à se tourner vers d’autres moyens de
communication plus directs comme les pages officielles des marques. Alors que
la page officielle était présentée comme le futur du marketing visant à
développer toujours plus l’univers de la marque, les internautes ont très vites
compris qu’un post de mécontentement sur celle-ci entraine une réponse beaucoup
plus rapide de l’entreprise que par les canaux habituels. Auparavant, les
spécialistes du marketing considéraient qu’un client mécontent faisait part de ses mésaventures à seulement 10 personnes environs. Mais, aujourd’hui, avec plusieurs milliers de followers ou de
fans des pages de marques, le risque de propagation du mécontentement a naturellement explosé.
Plus largement, le web 2.0 et le développement des réseaux
sociaux a offert au consommateur de devenir auteur comme acteur sur le réseau, éditeur comme consommateur de contenu.
Il peut alors devenir plus facilement un opposant engagé et actif par les
outils d’information, d’opinion et de relation dont il dispose.
Néanmoins, un récent mouvement de contestation émerge,
visant à dénoncer les carences relationnelles des réseaux sociaux actuels. En
effet, en ce qui concerne plus particulièrement Facebook, on remarque que les
seules interactions possibles avec un avatar sont de « liker » ou de
« devenir fan ». Aussi, les marques enferment les relations avec le
consommateur dans un monde ou seul l’action d’aimer prime.
Ainsi, l’agence Duke Razorfish vient de lancer un manifeste du « dislike » afin de réclamer la création d’un bouton
« dislike » ou « -1 » sur les pages officielles de Facebook
et Google+. Autre phénomène, l’apparition de l’application « Enemy Graph », permettant de déclarer des ennemis sur Facebook.
Créée par Dean Terry, Bradley Griffith et Harrison Massey, de l’University of
Texas, l’application permet de prendre le contre-pied des amitiés forcées et du
carcan moral de l’amour et de la gentillesse forcée sur Facebook.
Dans son acceptation plus large, ce mouvement de
contestation des codes actuels des réseaux sociaux se basent sur la notion de « dissonance sociale ». Aujourd’hui, les contacts répertoriés au sein des réseaux
sociaux sont organisés au sein de « listes d’amis ». Le qualificatif
« d’ami » sur Facebook suppose un lien amical réel, alors qu’il n’est
que virtuel. Cette dissonance amène à qualifier le lien entre deux utilisateurs
de « friending ».
Le concept d’amitié sur les réseaux sociaux n’est en rien une amitié réelle,
mais finalement seulement l’autorisation d’accès à des contenus, ce qui dénote
par rapport à une amitié réelle qui se suppose désintéressée. Contrairement à
l’amitié, le « friending » est un lien qui s’affiche publiquement et
qui peut être autant unidirectionnel que bidirectionnel.
Ainsi, Dean Terry, avec son application Enemy Graph, prend
le parti que les utilisateurs peuvent partager des différences et des choses
qu’ils n’aiment pas, plutôt que des choses qu’ils aiment. Les utilisateurs
seront alors capables de se trouver des points communs vis-à-vis de ce qu’ils
n’aiment pas et non plus par rapport à ce qu’ils aiment.
Dernière évolution, l’apparition d’un nouveau réseau social,
didn’t. A mi-chemin entre Twitter et
Facebook, didn’t prend justement le contrepied de ce dernier en permettant à
l’utilisateur de manifester ce qu’il n’aime pas, ne pense pas ou n’achète pas.
A moyen terme, ce nouveau réseau social pourra apparaître comme un générateur
de « class action », créant ainsi des communautés d’utilisateurs
mécontents autour de produits, personnalité ou évènement spécifiques,
mouvements alors difficilement quantifiables, puisque jusque-là la gamme
d’interactions disponibles ne le permettait pas.
Pour conclure, alors que les interactions sur les réseaux
sociaux étaient jusque-là cantonnées à une logique d’actions strictement positives,
l’émergence d’une propension aux interactions négatives amènera nécessairement
encore plus de complexité dans l’environnement des marques. A juste titre, ces
dernières pourront être confrontées à des conflits informationnels d’une
nouvelle nature avec l’organisation de communautés de consommateurs autour de
thèmes critiques. Aussi, plus que jamais, les entreprises devront se préparer à
cette évolution en verrouillant d’abord les caractéristiques de ses produits et
services en vue de prévenir toute critique, mais aussi en formant de façon
adéquate les équipes de Community Management.
Si les marques peuvent considérer cette tendance comme une
menace, elle peut aussi représenter une opportunité de mieux comprendre le
consommateur à travers des interactions plus riches. A la seule condition
d’être attentives, elle permettra aux marques de se corriger et de s’améliorer
avant que la contestation ne soit massive. Aussi, cette tendance permettra un
accroissement de la valeur de la marque et de ses produits à plus long terme.
De fait, aujourd’hui, ce seront nécessairement les entreprises qui l’auront
compris le plus rapidement qui en tireront le plus d’avantages concurrentiels.
Alors, quelle sera la première marque à créer un page « pas
fan » ?
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