lundi 3 septembre 2012

Ces pionniers de l'hacktivisme aérien

Le drone n'est plus une technologie réservée au domaine militaire. Son emploi se généralise et les applications se multiplient. Certains hacktivistes l'ont bien compris et voient dans ces petits appareils un nouveau moyen d'action. Mais, si leur but est éminemment louables, qu'en est-il d'autres groupes moins portés sur l'éthique de leur mouvement ? Ces drones pourraient-ils leur donner un avantage tactique face aux groupes adverses ?


En novembre 2011, le New York Times relatait l'emploi d'un drone pour filmer une manifestation en Pologne. Le Journal, titrant "Drone Journalism Arrives", mettait en lumière un nouvel usage de cette technologie étant autrefois réservée au domaine militaire. Le drone de l'entreprise polonaise RoboKopter, piloté à distance, a ainsi enregistré les images d'une manifestation débouchant sur une confrontation entre nationalistes d'extrême-droite, militants allemands d'extrême-gauche et forces de Police. 



On peut alors s'interroger sur la généralisation de son emploi par les médias, car cette technologie permettrait aux journalistes de filmer certaines confrontations sans y être exposés. Pourtant, le New York Times semble sceptique, admettant que finalement les images les plus spectaculaires restaient celles prises depuis le sol. Parallèlement à ces évènements, c'est l'utilisation par Rupert Murdoch pour son groupe NewsCorp, de l'AR. Drone de la société française Parrot, afin de prendre des clichés aériens de la catastrophe de Tuscaloosa, en Alabama, qui a fait débat. Ce petit dispositif, simplement pilotable par un I-phone, vient renforcer les discussions sur la vie privée et les paparazzis.

Mais, quelques mois plus tard, ce ne sont pas les médias qui vont véritablement s'emparer de ces drones, mais les manifestant eux-mêmes, et notamment le mouvement Occupy Wall Street. Tim Pool, se caractérisant comme journaliste citoyen, avait pour habitude de retranscrire les grandes manifestations du mouvement par ses live-tweets. Aujourd'hui, il dispose d'un nouvel outil, un drone, qu'il appelle l'Occucopter. Tim Pool et son équipe ont ainsi modifié un drone Parrot AR afin que celui-ci puisse fournir un flux constant de données en temps réel. L'ambition affichée est de suivre de près les agissements des forces de Police, mais aussi, précise Tim Pool, ceux des manifestants eux-mêmes, quitte à déplaire à certains organisateurs du mouvement. En équipant l'appareil d'une carte 3G ou 4G, la prochaine étape serait de pouvoir donner un accès aux commandes de vol partout dans le monde, depuis l'Internet.

Plus récemment encore, ce sont les membres du collectif d’hacktivistes Telecomix qui ont décidé de mettre des drones au service de la cause syrienne. Entant déjà impliqués dans les évènements d'Egypte et de Tunisie, ces hacktivistes n'hésitent à mettre au point des appareils qui permettront de faciliter la collecte et la diffusion d'informations, sans être exposé aux tirs, lors des combats. Plus que pour informer, ils espèrent aussi que les images enregistrées pourront peut-être aussi servir lors d'un futur procès.

Enfin, un autre groupe d'hacktivistes, le Loop, impliqué auprès des opposants syriens pour leur fournir des moyens de connexion sécurisés, s'interroge sur l'emploi de ces drones pour créer un réseau wifi au -dessus de quelques immeubles.

Tim Pool ou Telecomix ne cachent pas leurs difficultés à concevoir de nouveaux appareils assez performants pour satisfaire aux objectifs qu'ils se sont fixés. Mais, avançant petit à petit, ces grands "bricoleurs" (dans le bon sens du terme) démontrent bien que ces hacktivistes maîtrisent aussi bien le software que le hardware. S'inscrivant dans cette démarche open source qui leur est toute caractéristique, le fruit de leur travail est documenté et accessible à la communauté.

Leurs buts sont éminemment louables. Pourtant, on ne peut s'empêcher de penser que la mise au point de petits drones, afin de capturer des images destinées au grand public, n'est finalement qu'une première étape. En effet, tout comme dans le domaine militaire, ces "drones civils" peuvent donner certains avantages tactiques, et notamment lors de manifestations, ou même de confrontations. Que ce soit dans une posture pacifiste ou non, l'emploi de drones, pourvu qu'ils soient bien placés, peuvent indiquer les mouvements des forces polices ou des factions rivales (comme le montre la seconde vidéo ci-dessus). Si le groupe est bien organisé et disposant de moyens de communication adéquats, ces drones donnent alors la possibilité de déplacer les forces disponibles afin d'éviter le conflit, d'engager une retraite au bon moment, ou même de frapper là où les forces adverses sont le moins présentes. On pense alors à certains mouvements, comme les Black Bocs, groupe anarchiste et violent, qui s'est souvent illustré en marge des manifestations organisées lors de sommets internationaux. Ces derniers pourraient trouver une certaines utilité à l'emploi de drones pour identifier les mouvements de CRS ou encore veiller à ne pas se faire coincer dans une souricière.
Pour conclure, il est évident que la démocratisation de l'usage des drones peut faire rêver, tant le potentiel d'usages est vaste. Pourtant, peut-être est-il encore trop tôt pour parler d'une révolution technologique. Beaucoup de question se posent encore, comme celle des libertés et de l'intimité de la vie privée.

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